LUX IN TENEBRIS

Avec ce travail, Vincent Jendly propose une immersion en mer, profonde et intime. Le photographe motive sa démarche avec ces mots : « quand j’avais cinq ans, je me suis noyé. Je suis presque mort. Se noyer, c’est vivre une expérience totale : en quelques instants, la vision se voile, et on plonge dans les ténèbres. Mais je suis revenu à la vie, et à la lumière. Au fil des ans, j’ai apprivoisé l’eau, au point d’aimer y être quand tout le monde la craint : dans des eaux sombres la nuit, surtout la nuit. Dans l’eau éteinte, je flotte longtemps sur le dos, en fixant le noir. Je pourrais mourir, mais je ne meurs jamais. C’est dans ces moments-là que je me sens le plus vivant. Du moins, jusqu’à ce que la mer me commande clairement de venir à elle. Je lui tournais autour depuis un an ou deux. Son messager a été un armateur grec, qui m’a fait le cadeau miraculeux de m’ouvrir les portes de ses immenses cargos. J’en ai pris trois, à chaque fois en hiver et sous des latitudes nordiques. Je voulais prendre des risques (une réussite : mon dernier géant faillit se retourner dans l’Atlantique). Plus exactement, je crois que je voulais être grisé par la sensation de vivre ». Le travail issu de ces voyages, entre clair et obscur, confronte notre réjouissante insignifiance à un abîme inconfortable, froid et infini.